La poterne d’entrée

 
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’entrée d’une fortification ne se trouve pas à l’avant, mais bien à l’arrière de l’ouvrage.

En ce qui concerne la Chartreuse, la porte d’entrée était tournée vers la ville de Liège, à peu près dans l’axe du thier de la Chartreuse.

 

Sur cette photo, prise vers 1924, on voit qu’en fait, la poterne d’entrée est un tunnel percé à travers le rempart, flanqué de pièces percées de fenètres de part et d’autre. On voit également que ladite poterne est précédée d’une route pavée bordée de deux talus (en réalité, le fossé).

En réalité, l’entrée d’origine était précédée d’un pont levis. Non pas un pont levis de type « château médiéval », qui se refermait contre l’entrée, mais un pont plus en avant, comme du type de ceux que l’on voit sur les canaux des Pays-bas.

Ci-après, un croquis du pont-levis d’origine.

 

Ce choix s’explique par deux raisons:

  • Les fenêtres visibles sur la première photo étaient à l’origine des meurtrières. Et comme ces meurtrières avaient un angle de tir limité, il fallait tenir l’ennemi le plus loin possible de la poterne d’entrée, raison pour laquelle le pont ne pouvait être accollé au rempart.
  • Il est impossible de manoeuvrer un pont-levis de type « médiéval » dans un tunnel. En effet, il est nécessaire que les chaînes ou les cordes relevant ledit pont s’enroulent autour d’un mandrin faisant toute la largeur du passage. Et il est impossible de placer un tel dispositif dans un passage voûté.

De plus, lors de nos observations sur place, nous avons remarqué que les trous munis de poulies au dessus de part et d’autre de la porte ne portaient aucune trace d’usure, ce qui nous fait penser que des dispositifs n’ont jamais servi.

Ci-après, une vue de l’intérieur du fort, avec, sur la droite, le pigeonier dont il sera question dans un prochain article.

 

Les locaux flanquant la poterne étaient, comme dans toute caserne, le corps de garde, les cachots et l’infirmerie. Ces locaux étaient casematés, c’est-à-dire protégés de la bombe notament par une forme en voûte et une couche de terre. Ces locaux étaies surmontés, comme on le voit sur la photo ci-dessus, de plusieurs miradors. Nous ignorons s’ils sont d’origine.

En 1938, pour permettre l’entrée de camions dans le fort, cettr poterne a été démolie, le fossé remblayé, deux ouvertures à grand gabarit pratiquées et une rampe plus large aménagée près de la rampe d’origine. L’ouvrage de défense extérieur qui protégeait l’entrée a été nivelé et a fait place à l’esplanade que nous connaissons aujourd’hui.

Ci-après, une photo datant de 2001

 

On peut regretter qu’à l’époque, malgré un avis défavorable de la commission des Monuments et Sites, ces travaux de destruction aient été autorisés « du fait du peu d’intérêt de cette construction »…

Sur la photo suivante, prise depuis l’étage du BM09 on voit deux bâtiments, BM01, à droite, qui est l’infirmerie et BM15, à gauche, qui est le corps de garde et les cachots « modernes », Ils datant aussi de 1938/1939.

La longueur de ces bâtiments correspond plus ou moins à la profondeur de la poterne d’origine et des locaux annexes.


Pierre Michaux